silence-génocide-palestinien
12 nov. 2023
Chère Suisse,
Je dois te parler du génocide.
Tu sais, cette chose qui est arrivée aux Amérindiens en Amérique du Nord et du Sud pendant environ 400 ans, aux Aborigènes australiens au cours des deux derniers siècles, aux Arméniens il y a 100 ans, aux Juifs il y a 80 ans, aux Tutsis rwandais il y a 30 ans, et qui est en train de se produire en ce moment même avec les Palestiniens.
Parce que, Suisse, tu sembles être quelque peu confuse.
D'un côté, tu es signataire de tous les traités internationaux possibles sur les droits de l'homme en temps de conflit armé ou non, comme la convention de Genève - qui porte même le nom d'une de tes villes - et tu es très fier de ta tradition humanitaire, avec la Croix-Rouge qui est plus ou moins ton alter ego.
D'un autre côté, lorsque se produit un véritable génocide, tu restes silencieuse au mieux, et complice au pire.
Lorsque les Juifs ont été massacrés il y a 80 ans, tu as prétendu ne rien savoir. Tu as même renvoyé des réfugiés juifs en Allemagne, arguant que "le bateau était plein". TOI, cher Banque nationale suisse, tu as même accepté des plombages en or qui t'ont été envoyés par la Reichsbank allemande du régime nazi, en échange de devises suisses. Il t'a fallu attendre les années 1990 pour simplement le regretter.
Maintenant, après qu'Israël a enfermé tous les Palestiniens de Gaza dans l'un de leurs derniers enclaves ancestrales - une prison à ciel ouvert ou tout simplement un ghetto - depuis plus de 16 ans, et après que ce cycle insensé de violence entre les deux peuples ait produit son dernier acte tragique de meurtre de masse avec 1 400 Israéliens tués, tu as immédiatement condamné le Hamas et dit à Israël, l'Apartheid, que tu étais avec eux et leur "droit à l'autodéfense".
Israël, sans surprise, a déjà tué plus de 10 000 Palestiniens et je n'ai pas encore entendu ta condamnation de cette forme de violence indiscriminée, ni ton affirmation que la Palestine a également le droit de se défendre. Étrange.
Le mieux que tu puisses faire, chère Suisse, c'est appeler à un cessez-le-feu humanitaire - pour lequel je dois dire que je t'applaudis, car même faire ce genre de minimum est actuellement un acte de bravoure en Occident. Surtout que tu as voté en faveur de cela lors de la dernière Assemblée générale des Nations Unies et que tu veux aider les Palestiniens avec 90 millions de francs d'aide humanitaire. Ce n'est pas insignifiant. Donc, tu obtiens un Bravo de ma part pour cela.
Mais les doubles standards ne disparaissent toujours pas, n'est-ce pas ? Passons-les en revue ensemble :
Pour une raison confuse, tu as immédiatement publié une déclaration après les attaques du 7 octobre selon laquelle tu "étais aux côtés d'Israël", mais je n'ai pas encore vu de déclaration de ta part "aux côtés de la Palestine".
Ce qui signifie que, pour une raison confuse, les 1 400 morts israéliens semblent te toucher beaucoup plus que les 10 000 morts palestiniens. Encore une fois, étrange.
Pour une raison confuse, tu sembles blâmer le Hamas et le Hamas seul pour les morts survenant en Israël, mais quand il s'agit de morts sur les terres palestiniennes, tu "appelles toutes les parties" à respecter le droit humanitaire international - autrement dit, le droit de la guerre qui interdit de tuer des civils.
Eh bien, pour être tout à fait franc, chère Suisse, c'est aussi utile que d'appeler "toutes les parties" à respecter les droits de l'homme pendant le soulèvement du ghetto de Varsovie en 1942.
Le problème avec le génocide, c'est que lorsqu'il se produit, il se produit avec le plein consentement et le soutien de nombreux nombreux nombreux de tes amis. Parce que tu es neutre, Suisse, donc les autres sont tes amis. Et c'est une bonne chose, ne te méprends pas. Reste neutre, s'il te plaît. MAIS (et c'est un gros "mais"), tu devrais au moins être neutre du côté des victimes, pas du côté de l'agresseur. Sois neutre, mais accueille les réfugiés. Sois neutre, mais fais de la diplomatie pour le bénéfice des attaqués. Sois neutre, mais condamne les agresseurs, pas les victimes. Sois neutre, mais sanctionne les génocidaires, pas les génocidés.
Et enfin, dernier point mais non des moindres. Attention, chère Suisse, lorsque c'est facile de prendre position - tu sais, lorsque tout le monde te félicite pour cela - tu n'as vraiment rien d'important à dire, tu fais probablement simplement le jeu des puissants. Prendre réellement position en faveur des victimes est difficile et douloureux, et cela te coûtera quelque chose. Donc, si tu ne peux pas le faire, mieux vaut te taire et rester silencieuse sur les deux parties. Mais soutenir Israël en ce moment, c'est vraiment comme soutenir l'Allemagne pendant le soulèvement du ghetto de Varsovie.
Oh, et cher Banque nationale, si tu reçois des plombages en or dans les prochains mois en provenance du Moyen-Orient, dis non. D'accord ?
Merci.
Avec amour,
Pascal.
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